Where is my vote ?
« Où est mon vote ». C’est le slogan qui domine les actuelles
manifestations qui ont lieu ces jours-ci dans les rues de Téhéran et
qui est répété dans certaines capitales occidentales où défilent sans
désemparer des opposants au régime d’Amadjinedad.
Des centaines de
milliers de manifestants refusent les résultats d’un scrutin qualifié
de divin par le guide suprême de la révolution et que d’autres
ironisent comme une « céleste » tricherie.
Personne ne s’attendait à
l’irruption d’une telle contestation qui fait vaciller un régime, somme
toute réputée solide sur ses bases. Un régime qui présente bien des
paradoxes : où la modernité la plus criante avoisine des scènes dignes
du film satyrique « Persépolis » de Maja Satrapi. Le régime des
Mollahs, s’il est un mélange explosif de fondamentalisme et de
nationalisme, a donné à l’Iran un sens de la grandeur qui rappelle,
toute proportion gardée, la vision stalinienne d’une certaine URSS.
L’actuel
régime iranien est loin « de l’obscurantisme nucléaire » dépeint dans
certains journaux occidentaux. Il existe en Iran plus de deux millions
d’étudiants jouissant d’un enseignement supérieur de qualité, et les
femmes même voilées sont parmi les plus compétentes.
La vérité,
c’est qu’une telle évolution académique s’accommode mal des rigidités
théologiques d’un régime aux apparences monolithiques. Et la récréation
politique, sifflée à la faveur de la campagne électorale, a libéré bien
des refoulements.
L’effet Obama n’est pas non plus à négliger…en ce
sens qu’il a suscité chez les peuples du monde entier, une envie de
refaire le monde.
Mir Hossein Moussavi, un pur produit du régime
des Mollahs, se voit aujourd’hui, par le fantasme des jeunes et le
crayon de l’Histoire, transformé en hirondelle du « printemps
démocratique » iranien. Le leader des réformistes est porté aujourd’hui
par une « vague républicaine » qu’il est obligé d’assumer et qui
l’emportera on ne sait sur quelles rives ou « dérives ». Nul doute que
l’actuel régime ne se laissera pas facilement déborder et que la
révolution iranienne se prépare à « manger ses propres fils ». Pour
l’heure, nul ne peut prévoir l’évolution de l’actuelle conjoncture qui
pourrait déboucher sur un plus grand durcissement de la part d’un
régime contesté à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières.
Qui sait ce que peut faire un régime menacé pour flatter la fibre
nationaliste et unitaire de son peuple, pour combler une fracture qui
risque de couper en deux un pays aux ambitions régionales ?
Toute
chose qui expliquerait la prudence de Washington qui évite de se
laisser « prendre le pied » dans le tapis persan et mettre ainsi mal à
l’aise le candidat de l’opposition qui pourrait être perçu comme une
émanation satanique de l’Occident.
Toujours est-il qu’une bataille
rude est en train de se dérouler au sommet d’un pouvoir qui n’a jamais
laissé paraître aucune fissure, mais dont les contradictions éclatent
au grand jour et risquent de s’accentuer avec l’ampleur de la
contestation.
Mais Amadjinedad, s’il n’a pas gagné selon le taux
officiel de 60%, n’en n’est pas moins un leader populaire et ses
partisans se mobilisent aussi un peu partout et l’issue peut être
fatale.
C’est cela que semblent comprendre les partisans des
réformes qui refusent de se laisser aller à la violence des rues,
laquelle ne peut que mettre de l’eau au moulin des milices du régime,
et présenter, de leur projet de changement, une image encore plus
sombre que les sévères robes que portent les Mollahs.
Roody Edmé