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AILLEURS VU D'ICI (depuis Haïti)
AILLEURS VU D'ICI (depuis Haïti)
  • Un blog d'analyse de l'actualité en Haiti et à l'étranger - des sujets en rapport avec l'Afrique seront aussi abordés. Certains textes ayant rapport avec les littératures du monde seront aussi traités.
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19 avril 2010

Empathie versus sympathie !


La Banque Interaméricaine de développement vient d’annoncer  l’ouverture d’un compte spécial pour Haïti qui sera alimenté par des pays de l’UNASUR. L’Union économique Sud-Américaine, l’équivalent pour notre région, de l’Union Européenne tient à donner l’exemple du suivi dans ses engagements.  L’UE confirme  aussi une aide de 1.5 milliard de dollars à notre pays.


Pendant ce temps à Washington, le Congrès des Etats-Unis vote à l’unanimité l’allègement de la dette extérieure d’Haïti. Certains observateurs croient que pour une fois, certaines promesses faites pourraient être suivies d’effet…compte tenu de l’impact de la tragédie haïtienne sur les opinions publiques du monde et d’une mobilisation certaine de la « société civile internationale ».


Il n’y a qu’à voir le ballet des femmes et hommes d’Etat qui visitent la capitale haïtienne dévastée. Le pays haïtien meurtri devient un lieu de pèlerinage pour des politiques à la recherche d’une nouvelle humanité capable de redonner un certain idéal humaniste à une politique internationale qui se perd trop souvent dans le fleuve boueux des intérêts parfois sordides.


Il y a aussi, la quête de visibilité qui est la chose du monde la mieux partagée par les politiques de tous bords. Toute chose qui contribue à maintenir le dossier haïtien à flot et qui provoque ici et là quelques remous sur les échecs d’une certaine forme de coopération. Sous les lambris du building des Nations-Unis à Manhattan et sous les tentes ou fonctionnent à Port-au-Prince moult experts onusiens souffle le vent de la réforme tant souhaité dans les rapports entre bailleurs et récipiendaires.


Un article paru dans le tabloïd américain Huttington News, le 16 avril dernier, s’est fait copieusement l’écho de ces préoccupations, au moment ou une certaine aide qui se veut massive se met en place en faveur d’Haïti. L’article au titre provocateur « les Haïtiens ne méritent pas notre sympathie » est une sorte de plaidoirie pour son auteur Michael Fairbanks, expert coutumier des choses haïtiennes, en faveur d’une approche plus constructive de l’aide.  Les « Haïtiens ne méritent pas notre sympathie » a eu l’effet d’une petite « bombe syntaxique » balisant le champ miné d’une certaine coopération laxiste et bureaucratique. Citant des économistes qui abondent dans le même sens, Fairbanks développe son argumentation en établissant  une vérité déjà énoncée ici et ailleurs que l’aide ne fait pas sortir de la pauvreté.


Il a aussi souligné à l’encre forte, le caractère léonin des procédures de décaissement et la routine séculaire des « fonctionnaires » du « développement » qui ne font que maintenir sous perfusion certains Etats noyés dans la dépendance. Cette «  bouche à bouche » artificielle n’a jamais réanimé aucune société malade du sous-développement. Le sous-développement est un genre de pathologie qui provoque une sorte d’accoutumance vis-à-vis de l’aide et installe la dépendance.


Selon le vieil adage chinois du  poisson que l’on pêche soi-même au lieu d’en recevoir en cadeau ; Michael Fairbanks préfère à l’idée quelque peu caritative de « sympathie »  celle « d’empathie ». Une empathie qui verrait l’aide encourager les initiatives économiques haïtiennes…libérer un entreprenariat qui  languit dans les chaines du « mal-développement » et du tarissement du crédit.


Le développement d’un secteur des affaires élargi et résolument moderne qui tirerait de la débrouille  la « ruche » bourdonnante et active du secteur informel est aussi l’idée défendue  à New York par le président des chambres de commerce d’Haïti, le Dr Réginald Boulos, largement cité dans cet article de Fairbanks. Réginald Boulos contemple désormais l’horizon d’une nouvelle classe des affaires enrichi d’éléments de la classe moyenne.


Il reste pour que tout cela soit viable, « sustainable », pour utiliser le langage à la mode des experts: la participation citoyenne, le renforcement du rôle des femmes, une éducation de qualité constituve de nouvelles élites compétentes et responsables sont des priorités que l’aide annoncée et tant médiatisée pourrait contribuer à mettre en place.


Le ministre des finances Ronald Baudin a annoncé la restructuration du micro-crédit destiné à « favoriser la production et la création d’emplois sur le long terme ». Ce qui a fait dire à l’ambassadeur de France « Beaucoup de jeunes qui sortent des écoles secondaires et professionnelles voulant ouvrir leurs propres entreprises ne disposent pas de crédit. Une telle structure doit favoriser cette catégorie de la société ». Le secteur privé, L’Etat et l’International semblent se faire  ainsi écho sur une question cruciale pour l’avenir d’Haïti.


Il me semble que c’est agréablement nouveau ! Pourvu que les bonnes volontés ne se perdent pas dans les labyrinthes de la politicaillerie et les détestations stériles qui ruinent les meilleures volontés.

 

Roody Edme

 

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Commentaires
S
Dans le cas de ce que vient de vivre Haïti, l'aide doit absolument connaître deux étapes. Si Michael Fairbanks à raison pour ce qui est de la nécessité d'avoir une vue à long terme, il a tort s'il néglige la première étape qui est celle des besoins vitaux immédiats des victimes. Pour reprendre l'expression de Letsaa la Kosso, avant de penser à l'avenir, il faut relever celui qui est à terre. Il faut sortir de l'eau celui qui se noie puis lui apprendre à nager. Cependant, on ne peut que se réjouir que quelqu'un crie haut et fort qu'il est nécessaire d'aller plus loin cette fois afin de rompre avec la pratique trop communément admise consistant à maintenir le malade sous perfusion sans vraiment ensisager le moment où cette situation prendra fin.
L
Bonjour Roody,<br /> J'avoue avoir été choquée par ce titre provocateur "Les haïtiens ne méritent pas notre sympathie". Même si la suite du texte (que je n'ai pas pu lire encore), selon ce que vous en dites,ne devrait pas nous faire hurler de rage, il n'en demeure pas moins que l'utilisation du verbe 'mériter' choque. Ce titre a résonné en moi comme si l'auteur disait "les haïtiens ne sont pas à la hauteur de notre sympathie". La sympathie peut paraître "passive", élan passif qui, offert d'une certaine façon, peut maintenir celui qui la reçoit dans son état du moment. L'élan de sympathie, donc le mouvement qu'il imprime, vient du "donneur", c'est son bras ou sa main qui détiennent la force qui sera communiqué à celui qui est par terre pour le tirer de la position assise ou couchée dans laquelle il ou elle se trouve. Le problème ici est, une fois debout, comment garder, maintenir ce mouvement et vers où diriger nos pas? Mais ce qui fait que l'auteur préfère l'empathie à la sympathie ne se retrouve-t-il pas dans l'empathie même définie comme cette capacité humaine de se mettre à la place de l'autre, d'épouser ou même d'intégrer son ressenti, son vécu immédiat, son être -là? Le danger avec l'empathie ne serait-il pas qu'en épousant les problèmes de l'autre, je puisse même involontairement me substituer à lui et, en vérité, le réduire à l'inaction?<br /> J'étais en train de réfléchir à la perception de la "pitié" dans les cultures africaines bantoues. Et j'en étais arrivée à la compréhension que la pitié dans ces cultures n'est autre que l' expression et la manifestation de la solidarité au sens traditionnelle telle que vécue dans les sociétés africaines d'antan. La connotation négative actuelle de la pitié est extérieure aux cultures bantoues.<br /> Mais en fait, sympathie, empathie, pitié, solidarité ne devraient-elles pas aboutir sur une seule et même chose? L'esprit du Koumbite, indissociable de l'action qui tire hors de la pauvreté.<br /> Meilleures salutations.
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